mercredi 4 janvier 2017

Le Cycle des Monarchies de l'Ombre (Olivier Lusetti)

En Chine ancienne, l'empire se morcelle. Les princes annexent les états comme le ver à soie dévore les feuilles du mûrier. Les astrologues prophétisent la fin des temps. La Mort qui tremble quand toute vie est menacée dépêche son Envoyé. L'entité envahit l'âme d'un jeune prêtre. Partageant sa conscience, elle le force à rechercher une incroyable magie curative. Dans un des Royaumes combattants, un souverain agonise. Son décès obligera sa fille guerrière au mariage. Révoltée, elle fait enlever le religieux. Que sont réellement les huit émissaires écarlates du dieu Zargose, identiques telles des gouttes d'eau, qui fouillent l'âme comme le tisonnier la braise pour raviver les pensées cachées ? Dans le royaume de Zhang Zhung, pour quelle raison la jeune « Premier oracle » du monastère de Jiu Gonpa se réveille-t-elle terrorisée ?

Voici une chronique qui promet d’être assez difficile à rédiger. Non pas que je n’ai pas apprécié le livre, mais parce qu’il me reste une impression de n’avoir pas tout saisi, et que cela s’avère profondément dérangeant.

Le Cycle des Monarchies de l’Ombre nous embarque en Chine ancienne, dans laquelle des forces obscures tentent de s’emparer du pouvoir. La magie et les coutumes de l’époque se mêlent donc pour créer un ensemble de fantasy sombre. Le premier opus nous décrit la formation de l’Envoyé des Monarchies, un homme dont les actes vont avoir des incidences notables pour le futur et la lutte qui s’est engagée. Par la suite, le lecteur sera amené à contempler comment Zargose tâche de prendre le pouvoir parmi les humains, et comment il essaie de conquérir sa promise…

Ce résumé est bien peu par rapport à tout ce que vous trouvez dans le roman. Il faut dire que le bouquin fait plus de 450 pages, écrit raisonnablement petit, donc ça représente pas mal de contenu. L’intrigue est très riche, très développée, et semble aller beaucoup plus loin que ce que le lecteur découvre entre les pages.

Je ne savais pas trop à quoi m’attendre, en commençant ce roman. La couverture est intrigante, le résumé me parlait bien, et comme vous le savez (ou pas), je suis de nature curieuse. J’ai très vite remarqué que la plume était très soignée, presque professorale, et que l’histoire dans laquelle je m’engouffrais ne souffrait d’aucun détail inutile ou oublié. Chaque chose avait son importance et sa place. De fait, j’ai rapidement compris que j’allais devoir me concentrer pour tout saisir.

C’est là que ça va moins bien : je pense que je ne me suis pas assez concentrée, que je n’ai pas pris assez de moments pour lire au calme afin de saisir toutes les subtilités du roman. L’intrigue principale m’a embarquée, parce qu’elle est assez retorse et que je suis généralement partie prenante du « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ». En soi, je me demandais où Olivier Lusetti voulait m’emmener, et je voulais savoir où j’allais atterrir en fin de compte. Pour ça, je ne suis pas déçue du voyage. Je regrette juste de n’avoir pas complètement compris la fin, sûrement à cause d’une fatigue qui a du mal à s’en aller.

Pour autant, il est indéniable que nous avons ici à faire à un récit de qualité. Je n’avais encore jamais lu de livre ayant trait à la Chine ancienne, et j’avoue que j’ai beaucoup aimé cette plongée dans ce contexte, que j’ai seulement entrevu sur écran. On y découvre des pensées de l’époque, un système politique, des coutumes intéressantes, et si en plus vous ajoutez un côté magique qui est très présent dans la première partie, ça vous donne un ensemble remarquable. Je reste admirative de la façon dont Olivier Lusetti a su mêler son imaginaire au côté historique.

Concernant les personnages, ils s’avèrent nombreux. On peut cependant rapidement s’attacher à Yingfù, que l’on suit durant tout le premier tome sur un chemin difficile d’apprentissage. J’ai cependant apprécié sa détermination, son humilité et sa douceur. Il reste humain et ses faiblesses nous le rendent plus proche, alors que son intelligence et sa ressource provoquent notre admiration. Il en va de même pour des personnages comme Vivpière, qui, elle, est plus entière, plus tranchante. Pour autant, elle reste elle aussi humaine, et lorsqu’elle se dévoile dans les différentes parties où on la retrouve, elle devient attachante aussi. J’ai eu plus de mal avec Bourcrane, en revanche. Ça s’est un peu amélioré sur la fin, mais peu.

Les « méchants » de l’histoire nous marquent assez vivement, je dois le dire. C’est assez effrayant, comme menace, et cela fait partie d’une réalité au départ assez abstraite, mais qui tend à devenir concrète. Et ça, on a peine à l’imaginer, et pourtant, c’est décrit relativement bien et comme réaliste. Je n’aimerais pas qu’un truc pareil pèse sur notre monde avec tant de force que dans ce bouquin !

Au niveau de la plume, comme je l’ai dit plus haut, elle est très maîtrisée. Elle ressort très professorale, tâchant de guider son lecteur au mieux, dans une intrigue et un monde qui n’ont rien d’aisé et qui pourraient facilement perdre celui qui s’y plongerait. Ne parlons pas des dialogues, qui laissent percer l’opacité de la pensée orientale pour les occidentaux que nous sommes (il faut parfois relire, parce que ce n’est pas exactement le même mode d’expression que nous). Je lui reproche toutefois à certains moments trop de détails crus (merci, mais la description d’un viol n’apporte pour moi pas grand-chose à l’histoire, navrée), et un manque de rythme qui parfois s’avérait difficile à soutenir. Enfin, ce n’est pas vraiment un reproche, plus un constat du fait que j’ai eu parfois du mal à me replonger dans l’histoire malgré sa richesse indéniable.

Enfin, si je dois m’arrêter sur les valeurs, il est clair qu’on parle d’une forme de lutte entre le Bien et le Mal. Yingfù répète souvent aussi de sages paroles sur le libre arbitre et sur les conséquences de ses choix. Cela nous fait prendre conscience que nous avons tous un rôle à jouer, des responsabilités à assumer, peu importe le contexte ou l’époque dans laquelle nous vivons. On croise aussi de nombreuses reprises des phrases philosophiques qui pourraient devenir des citations plutôt chouettes, en soi. Il reste que chacun a le pouvoir de faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre et que nous pouvons tous changer, il faut s’en donner la peine.

En conclusion, Le Cycle des Monarchies de l’Ombre a été une lecture intéressante. C’est un récit très riche, au rythme parfois assez lent, mais qui reste fascinant. Pour un peu que le lecteur s’accroche, il verra s’ouvrir les portes d’un monde qui mêle de nombreux détails de la Chine ancienne avec un imaginaire poussé. Rien n’est laissé au hasard et la réflexion m’apparaît à l’ordre du jour. L’ampleur de l’intrigue se dévoile au fil des pages, portée par des personnages emblématiques mais qui restent humains. Si je n’ai pas très bien saisi la fin, sûrement à cause de la fatigue, cela reste un récit que je peux conseiller aux amateurs de fantasy, parce qu’il est assez original et qu’on sent un véritable travail dans sa conception et sa rédaction.
Ce sera donc un 16/20 pour moi !

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